Cour administrative d’appel de BORDEAUX, 16 janvier 2024, Mme B. c/ Commune du CHATEAU-D'OLERON, Req. n° 22BX01811
Fonction publique | Collectivité d’origine | Conséquences de la décharge de fonctions | Emplois fonctionnels | Exercice normal des fonctions | Fin de détachement sur emploi fonctionnel | Indisponibilité pour raison de santé | Intérêt du service | Maladie | Motivation (Non) | Sanction déguisée (Non)
En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 4° (...) abrogent une décision créatrice de droits (...) ". L'arrêté en litige, qui vise l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, fait état de l'indisponibilité physique pour maladie de Mme B... en rappelant que celle-ci exerçait les fonctions de directrice générale des services de la commune, et met fin à son détachement sur cet emploi en invoquant l'intérêt du service. Cet arrêté satisfait à l'obligation de motivation prévue par les dispositions précitées.
En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article 53 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " Lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire occupant un emploi fonctionnel mentionné aux alinéas ci-dessous et que la collectivité ou l'établissement ne peut lui offrir un emploi correspondant à son grade, celui-ci peut demander à la collectivité ou l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel soit à être reclassé dans les conditions prévues aux articles 97 et 97 bis, soit à bénéficier, de droit, du congé spécial mentionné à l'article 99, soit à percevoir une indemnité de licenciement dans les conditions prévues à l'article 98. Ces dispositions s'appliquent aux emplois : - de directeur général des services (...) ".
Il résulte de ces dispositions que lorsqu'il est mis fin au détachement d'un fonctionnaire territorial sur un emploi fonctionnel mentionné à l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, à l'initiative de la collectivité au sein de laquelle il est détaché sur un tel emploi, que cette fin de fonctions intervienne avant le terme normal du détachement ou résulte du non-renouvellement de celui-ci, ce fonctionnaire est en principe réintégré dans son corps ou cadre d'emplois et réaffecté à la première vacance ou création d'emploi dans un emploi correspondant à son grade relevant de sa collectivité ou de son établissement d'origine en application de l'article 67 de la même loi. Si sa collectivité ou son établissement d'origine n'est pas en mesure, à la date à laquelle la fin du détachement prend effet, de le réaffecter sur un tel emploi, le fonctionnaire est en droit, dans les conditions prévues par l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, de demander à la collectivité ou à l'établissement dans lequel il occupait l'emploi fonctionnel de bénéficier d'un reclassement, d'un congé spécial ou d'une indemnité de licenciement.
En l’espèce, Mme B... n'a jamais été titularisée dans les effectifs de la commune du Chateau d'Oléron au sein desquels elle a travaillé comme agent détaché jusqu'au 14 janvier 2020, date de l'arrêté en litige mettant fin à ce détachement. Il ressort des pièces du dossier que, avant d'être détachée sur l'emploi de directrice générale des services de cette commune, Mme B... était employée par le conseil départemental de la Charente-Maritime. Aucun élément au dossier ne permet d'estimer que le département de la Charente-Maritime, la collectivité d'origine de Mme B..., n'était pas en mesure de proposer à cette dernière un poste équivalent à son grade lorsqu'il a été mis fin au détachement. Dans ces conditions, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le maire du Château-d'Oléron ne pouvait, sans méconnaître les dispositions précitées de l'article 53 de la loi du 26 janvier 1984, prendre l'arrêté en litige du 14 janvier 2020 sans lui proposer un reclassement. Le moyen ainsi soulevé doit être écarté.
En troisième lieu, il peut être mis fin au détachement des agents occupant les emplois fonctionnels mentionnés à l'article 53 de la loi n°84-53 du 26 janvier 1984 pour des motifs tirés de l'intérêt du service. Eu égard à l'importance du rôle des titulaires de ces emplois et à la nature particulière des responsabilités qui leur incombent, le fait pour le directeur général des services d'une commune de s'être trouvé placé dans une situation ne lui permettant plus de disposer de la part de l'autorité territoriale de la confiance nécessaire au bon accomplissement de ses missions peut légalement justifier qu'il soit, pour ce motif, déchargé de ses fonctions. Il en est de même lorsque l'état de santé de l'agent n'est plus compatible avec l'exercice normal de ses fonctions de directeur général des services.
En l’espèce, il est constant qu'au 14 janvier 2020, date de l'arrêté en litige, Mme B... n'avait toujours pas repris ses fonctions au sein de la commune du Château-d'Oléron depuis son placement en congé de longue maladie le 14 juin 2018. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du courrier que le maire lui a adressé le 22 mai 2019, que Mme B... n'a pas donné suite aux propositions d'entretien formulées pour évoquer sa situation professionnelle ainsi que les difficultés rencontrées par les services de la commune du fait de son absence prolongée. Ces difficultés avaient en outre été accentuées par les problèmes de santé rencontrés par l'adjoint de Mme B... et par la fin, prévue en septembre 2019, de l'intérim assuré en son absence par un autre collaborateur. Dans ces conditions, en estimant que l'indisponibilité pour raisons de santé de Mme B... n'était plus compatible avec l'exercice normal de ses fonctions et que l'intérêt du service justifiait qu'il soit mis fin à son détachement dans l'emploi fonctionnel de directrice générale des services, le maire du Château-d'Oléron n'a entaché sa décision ni d'inexactitude matérielle des faits, ni d'une erreur manifeste d'appréciation et n'a aucunement entendu sanctionner l'intéressée de manière déguisée.
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