Droit administratif | Absence d’alternatives thérapeutiques | Manquement à l’obligation d’information (Oui) | Pathologie antérieure | Perte de chance (Non) | Préjudice réparable (Non) | Responsabilité hospitalière | Responsabilité médicale | Risque d’échec (Oui)
Cour administrative d’appel de PARIS, 24 janvier 2023, M. E. c/ Centre Hospitalier National d'Ophtalmologie des QUINZE-VINGTS, Req. n° 21PA05700
En cas de manquement à l'obligation d'information, si l'acte de diagnostic ou de soin entraîne pour le patient, y compris s'il a été réalisé conformément aux règles de l'art, un dommage en lien avec la réalisation du risque qui n'a pas été porté à sa connaissance, la faute commise en ne procédant pas à cette information engage la responsabilité de l'établissement de santé à son égard, pour sa perte de chance de se soustraire à ce risque en renonçant à l'opération. Il n'en va autrement que s'il résulte de l'instruction, compte tenu de ce qu'était l'état de santé du patient et son évolution prévisible en l'absence de réalisation de l'acte, des alternatives thérapeutiques qui pouvaient lui être proposées ainsi que de tous autres éléments de nature à révéler le choix qu'il aurait fait, qu'informé de la nature et de l'importance de ce risque, il aurait consenti à l'acte en question.
En l’espèce, le requérant soutient qu'il n'a reçu aucune information préalablement aux interventions subies à l'œil gauche, en particulier quant aux risques d'échec de ces opérations et de cécité en découlant. Le Centre Hospitalier National d'Ophtalmologie des QUINZE-VINGTS n'établit pas qu'une telle information aurait été effectivement délivrée à l'intéressé, alors qu'il résulte de l'expertise que le requérant ne "pouvait espérer une récupération d'environ 4/10ème avec une chance sur trois" et que le risque d'échec et d'évolution défavorable de sa pathologie était ainsi élevé.
Cependant, il résulte du rapport d'expertise que le requérant, atteint d'un diabète non équilibré, souffrait d'une rétinopathie diabétique proliférante très évoluée au niveau de l'œil de gauche, son acuité visuelle étant de 1/10ème lors de sa consultation au Centre Hospitalier National d'Ophtalmologie des QUINZE-VINGTS le 1er février 2015. Selon l'expert, l'intéressé présentait un décollement de rétine tractionnel et une hémorragie intravitréenne persistante, stade ultime de ce type de pathologie, qui l'exposait, en l'absence d'interventions, à un risque certain de cécité à court terme, tout comme l'hypertonie et le glaucome oculaire consécutifs à la première opération pratiquée le 20 février 2015 et réfractaires aux traitements médicamenteux. En outre, il ne résulte pas de l'instruction, et n'est pas davantage soutenu par le requérant, qu'il aurait existé des alternatives thérapeutiques aux 4 interventions de vitrectomie réalisées en 2015. Dans ces conditions, il apparaît suffisamment certain que, compte-tenu de son état de santé, de l'évolution prévisible de sa pathologie dont l'issue certaine était la cécité à court terme et en l'absence d'alternative thérapeutique, le requérant aurait consenti aux interventions pratiquées.
Par suite, le manquement du Centre Hospitalier National d'Ophtalmologie des QUINZE-VINGTS à son devoir d'information n'a privé le requérant d'aucune chance de se soustraire au risque qui s'est réalisé.
Avocat Droit Administratif
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